La couleur des sentiments • Kathryn Stockett

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Éditions Actes Sud, 2013 (599 pages)

Ma note : 16/20

Quatrième de couverture …

Chez les Blancs de Jackson, Mississippi, ce sont les Noires qui font le ménage, la cuisine, et qui s’occupent des enfants. On est en 1962, les lois raciales font autorité. En quarante ans de service, Aibileen a appris à tenir sa langue. L’insolente Minny, sa meilleure amie, vient tout juste de se faire renvoyer. Si les choses s’enveniment, elle devra chercher du travail dans une autre ville. Peut-être même s’exiler dans un autre État, comme Constantine, qu’on n’a plus revue ici depuis que, pour des raisons inavouables, les Phelan l’ont congédiée.
Mais Skeeter, la fille des Phelan, n’est pas comme les autres. De retour à Jackson au terme de ses études, elle s’acharne à découvrir pourquoi Constantine, qui l’a élevée avec amour pendant vingt-deux ans, est partie sans même lui laisser un mot.
La jeune bourgeoise blanche et les deux bonnes noires, poussées par une sourde envie de changer les choses malgré la peur, vont unir leurs destins, et en grand secret écrire une histoire bouleversante.

La première phrase

« Mae Mobley, elle est née de bonne heure un dimanche matin d’août 1960. Un bébé d’église, comme on dit. »

Mon avis …

Auréolé du grand prix des lectrices ELLE 2011, j’ai ouvert ce roman avec autant d’excitation que de crainte. J’ai souvent pu lire qu’il faisait partie des coups de cœur de bon nombre de blogueuses et autant vous l’avouer : avec ce pavé de 600 pages, j’avais aussi peur de m’ennuyer ferme. Il n’en a rien été puisque j’ai adoré ce livre du début à la fin. Il constitue pour moi un quasi coup de cœur ! Et je n’ai maintenant qu’une envie : jeter un œil sur son adaptation au cinéma.

Ce roman à trois voix est divisé en plusieurs chapitres. Il donne ainsi tour à tour la parole à Aibileen et Minny, deux bonnes noires chargées de la maison et de l’éducation des enfants, travaillant respectivement chez les Leefolt et les Foote, ainsi qu’à Skeeter (moustique en anglais) qui vient tout juste de terminer ses études de journalisme. En retournant vivre chez ses parents, à Jackson, Skeeter s’oppose à ses amies d’enfance, enfermées dans leur vie de femme au foyer. Car la jeune femme a un projet qui n’est pas sans risque : raconter le quotidien difficile des domestiques noires qui travaillent alors pour les Blancs. Encouragée par une éditrice de New-York, Eugenia Pheelan (Skeeter) décide d’interroger, en secret, les domestiques de ses meilleures amies.

La couleur des sentiments est un très bon roman sur les relations interraciales du Sud des États-Unis dans les 60’s. Les personnages sont extrêmement attachants. Une fois n’est pas coutume, je crois que je les ai pratiquement tous aimés. Même Hilly Holbrook, absolument détestable en peste de service ou Célia Foote, riche et superficielle (mais finalement malheureuse). J’ai aimé suivre le combat de ces domestiques noires, qui au-delà de toute attente et se mettant alors elles-mêmes en danger, choisissent de faire bloc autour d’Eugenia afin de se livrer et de changer les choses. Les ressentis entre les bonnes et les maîtresses de maison sont palpables : respect, mépris ou encore indifférence. Skeeter devra mentir pour les protéger, lutter contre les codes d’alors et même s’éloigner de ses amies d’enfance afin de mener à bien son projet.

J’ai apprécié que Kathryn Stockett distille quelques notes d’humour dans ce contexte difficile (l’épisode des cuvettes de toilette sur la pelouse de Miss Hilly notamment). Mais surtout, j’ai été touchée par l’amour apporté par les domestiques aux enfants blancs (surtout la relation entre Aibileen et Mae Mobley). Un seul regret : j’aurais aimé avoir un épilogue ou un petit chapitre supplémentaire. Je trouve que le roman se termine un peu en queue de poisson. J’aurais apprécié que l’auteure fasse un point précis sur le devenir de certains personnages.

Je pourrais encore parler du livre pendant des pages entières. Mais en résumé, je vous conseille mille fois la lecture de ce roman. Il nous éclaire sur les conditions des Noirs aux États-Unis, au temps où la lutte contre la ségrégation raciale (Rosa Parks, Martin Luther King) commence tout juste à se mettre en place.

Extraits …

« « Les entretiens auront lieu en secret. Étant donné que, comme vous le savez, les choses sont un peu dangereuses ici, en ce moment. » À vrai dire, je n’en savais pas grand-chose. Je venais de passer quatre ans enfermée derrière les murs de l’université, à lire Keats et Eudora Welty et à me concentrer sur mes dissertations de fin de trimestre.
« Un peu dangereuses ? » Elle a ri. « Les marches à Birmingham, Martin Luther King, les chiens lancés sur des enfants noirs… Ma chère, il n’y a pas de sujet plus brûlant dans l’actualité. Mais, je suis désolée, ça ne marchera jamais.»

« « Je suis là, Miss Celia ! » Je passe la tête à la porte de sa chambre et elle est assise sur son lit, parfaitement maquillée et serrée dans sa tenue du vendredi soir alors qu’on est mardi, en train de lire les cochonneries du Hollywood Digest comme si c’était la Sainte Bible.»

Roman lu dans le cadre d’une lecture commune avec Lydieetseslivres, son avis ici

28 commentaires sur “La couleur des sentiments • Kathryn Stockett

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      1. J’ai entendu aussi pas mal de critiques positives sur ce film là. Est-ce que ça te dit de venir voir mon dernier article? C’est une nouvelle idée alors ça m’intéresserait d’avoir ton avis :).

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  1. J’ai aussi adoré ce roman. On en apprend des tonnes sur la société bourgeoise bien-pensante du sud des Etats-unis. L’un des passages les plus marquants pour moi a été celui où Skeeter souligne l’hypocrisie de ses copines: elles lèvent des fonds pour les enfants africains (donc noirs), mais traitent leurs domestiques noires comme de la merde. Les nanas ne voient pas en quoi c’est contradictoire. Gros lol – et une petite larme, devant tant de bêtise…
    Par contre, il me semble qu’il y a eu beaucoup de critiques dans la communauté noire-américaine, notament sur le fait que les noirs n’avaient pas besoin qu’une blanche vienne raconter leur histoire (ou un truc du genre – en tout cas il y a eu une petite polémique sur le fait qu’une blanche se fasse un nom sur un sujet « noir »). Aussi, l’auteur se serait beaucoup inspirée de sa propre nanny pour le personnage d’Aibileen, dont elle aurait très peu modifier le prénom, alors que cette dernière n’était pas d’accord. Tout cela de mémoire, j’ai lu ce roman il y a maintenant quelques années, donc il se peut que ma mémoire me trahisse un peu sur les faits.
    J’aimerai aussi beaucoup voir le film!

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    1. Sur le même thème, je te conseille « Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur » (un classique!) et « La vie des abeilles ». Ces deux livres ont aussi été adaptés en films, mais je ne les ai pas vus.

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      1. En fait j’ai vérifié, en français le second livre s’appelle « Le secret des abeilles » (en anglais « The secret life of bees »). Le film s’appelle « Le secret de Lily Owens ». L’histoire d’une ado blanche qui fugue et qui se retrouve hébergée par des soeurs noires et apicultrices, à la même époque que « La couleur des sentiments ».

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    2. Je ne me représentais pas du tout la société bourgeoise américaine des 60’s ainsi. Je ne savais même pas que les femmes noires étaient souvent « embauchées » pour travailler dans ces familles. Dans de ce côté là, j’ai appris énormément de choses.

      Ah j’ignorais que la nanny de l’auteure était en désaccord avec le projet de Kathryn Stockett. Par contre c’est vrai que l’auteure l’évoque à la fin. Elle dit même qu’elle se sentait beaucoup plus proche de sa gouvernante que de ses frères et sœurs parce qu’elle était la petite dernière de la famille et qu’elle se sentait isolée dans la fratrie.

      Oh moi aussi. Le film est prévu ce soir ou demain, il dure quand même 2h30!!

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  2. Ce fut une lecture commune très sympathique, les jours fériés m’ont empêché de répondre à ton mail. J’espère que je serai mieux organisée pour la suivante. Je ne vais pas non plus classée cette lecture dans mes coups de coeur même si je l’ai beaucoup aimé. J’ai beaucoup aimé ces femmes qui se battent avec leurs moyens pour faire bouger les choses mais il m’a quand même manqué quelque chose pour qu’elles me touchent profondément, j’ai quand même eu un pincement au coeur à la lecture des dernières pages.

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    1. Oh pour moi aussi, je suis contente qu’on ait pu la faire ensemble. Et je t’en prie.
      Oui je viens de lire ton avis sur ton blog à l’instant. 🙂 Pour moi, disons que certaines m’ont touchées plus que d’autres. Je crois que mes personnages préférés restent Skeeter et Aibileen. Et peut-être Celia Foote. J’avais un peu de peine de la voir se faire rejeter car elle ne rentre pas dans la norme.
      Moi aussi. J’aurais quand même souhaité un épilogue, l’auteure reste floue au niveau des devenirs des personnages (Minny, Aibileen et les autres).

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    1. Oh merci pour le lien ! Et je suis tellement d’accord avec tout ce que tu as pu dire dans ton billet. Je suis allée voir du coup 😉 Comme toi, j’aurais aimé avoir des petits éléments sur le devenir de Minny, Aibileen et les autres. Mais je crois que c’est le seul point négatif que je retiens du livre.

      Et j’ai lu ta chronique plus que positive pour le film (avec un 18 sur 20 quand même). Tu me donnes encore plus envie de le voir. 🙂

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    1. Oui il est vraiment prenant. 🙂
      Pour le film, il correspond exactement à ce que j’attendais donc tout comme toi j’ai aimé. Je me représentais les personnages comme ils sont dans le film (à part peut-être pour Hilly que j’imaginais blonde).

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  3. Je n’ai malheureusement pas encore lu le roman mais j’ai énormément apprécié le film ! Vu que ce dernier semble être une excellent adaptation, j’en suis moins frustrée ^^ Je peux tout de même avancer que ton avis rejoint complètement le mien, j’ai trouvé que c’était une histoire vraiment forte et touchante ! Merci pour ce beau billet 🙂

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    1. Oh ton commentaire me fait plaisir. Tu as donc le même ressenti que moi, on est beaucoup à avoir apprécié le film, et il le mérite. D’autant plus qu’il reste fidèle au livre oui. C’est aussi une chose que j’ai pu apprécier, quand ce n’est pas le cas ça a un peu tendance à m’agacer. ^^

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  4. Quelle belle lecture ! ! Je ne suis pas du tout une fan des Etats-Unis à la base et je ne connais pas très bien leur littérature, quelle soit contemporaine ou plus classique…Mais La Couleur des Sentiments était vraiment un roman qui m’interpellait, je le croisais beaucoup et j’ai sauté le pas il y’a trois ans en me disant que, de toute façon, je ne perdais rien à tenter cette lecture ! Effectivement, bien m’en a pris… 😉 Une lecture qui m’a vraiment marquée, tout comme le film que j’ai vu peu après et qui m’a beaucoup touchée. J’ai vraiment beaucoup appris et je relirai peut-être ce roman à l’occasion.

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    1. Je trouve le film plutôt fidèle à sa version d’origine (ce qui est assez rare pour être souligné). Je l’avais bien aimé moi aussi. C’est vrai que ce roman est beau, touchant, je m’en rappelle encore très bien et je pense le relire un jour.

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